dimanche 12 juillet 2009

Les Vaudois des Hautes-Alpes, Ernest Thorant.

Poursuivant mon programme de description d'ouvrages sur les Vaudois des Hautes-Alpes, je me suis intéressé à deux ouvrages de fond, qui servent encore de référence sur le sujet. Pour mémoire, l'hérésie vaudoise s'est implantée dans quelques vallées du Briançonnais (Freissinières, l'Argentière, la Vallouise, Val Cluson), à partir du mouvement lancé à Lyon dans la deuxième moitié du XIIe siècle par Pierre Valdo : "Les Pauvres de Lyon". Plutôt qu'une hérésie, il s'agit d'un mouvement dissident qui veut revenir à la pureté évangélique, en s'opposant à l'intermédiation de la hiérarchie ecclésiastique dans l'accès aux Ecritures Saintes. Malgré les persécutions dont il fut la cible dans les montagnes du Dauphiné, ce mouvement survécut et rejoignit la Réforme en 1532 lors du synode de Chamforans.

Le pasteur Eugène Arnaud (1826-1905), grand historien du protestantisme dauphinois, a rassemblé 4 mémoires sur les Vaudois :
Mémoires historiques sur l'origine, les mœurs, les souffrances et la conversion au protestantisme des Vaudois du Dauphiné. Crest, 1896.

Ces 4 mémoires sont extraits de différentes revues savantes, mais forment un tout cohérent sur l'histoire des Vaudois des vallées briançonnaise, depuis leur implantation jusqu'à leur intégration dans la Réforme. Ce recueil tiré à 100 exemplaires est rare.

Le deuxième ouvrage est une thèse de l'Ecole de Chartes, soutenue en 1912 par Jean Marx et publiée par Champion à Paris en 1914 :
L'inquisition en Dauphiné. Etude sur le développement et la répression de l'hérésie et de la sorcellerie du XIVe siècle au début du règne de François 1er.




Le titre assez général de l'ouvrage ne doit pas nous induire en erreur. Il s'agit essentiellement du récit des persécutions des Vaudois des vallées briançonnaise par l'inquisition, en particulier lors de la croisade de 1487-1488 menée par Alberto Cattaneo (Albert de Cattanée), à la demande de l'archevêque d'Embrun, Jean Baile, pour purger ces vallées de l'hérésie vaudoise. Preuve que l'arbitraire n'était plus aussi puissant en France à l'orée du XVIe siècle, les habitants des vallées firent appel au roi des spoliations et des violences qu'ils ont subies. La sentence de 1509 a réhabilité solennellement les habitants des vallées et leur a théoriquement permis de recouvrer leurs biens confisqués.
Ce livre fait encore autorité sur le sujet.

Pour ceux qui voudrait aller plus loin sur les Vaudois, je recommande cet ouvrage, qui dépasse évidemment le cadre des Hautes-Alpes, en retraçant l'histoire du mouvement vaudois. Cela permet de situer l'histoire particulière des Vaudois des vallées briançonnaises dans le mouvement général de cette dissidence.
Les Vaudois. Histoire d'une dissidence (XIIe-XVIe siècle, par Gabriel Audisio, Fayard, 1998.



Sans transition, je me suis aussi penché sur une personnalité attachante de l'alpinisme dauphinoise de la fin du XIXe siècle. Ernest Thorant (1854-1896), installé à Grenoble, a été pionnier en se faisant le promoteur de l'alpinisme sans guide et en fondant un des premiers clubs d'escalade de France, à Grenoble en 1895 : le
Rocher-Club. Il créait ainsi une rupture par rapport à la culture scientifique et patriotique du Club-Alpin de l'époque, en se faisant un des artisans de la "sportivisation" de la pratique de la montagne. Visiblement partisan de toutes les innovations de son époque, il fonda aussi le premier club de ski en France : le Ski-Club des Alpes, en janvier 1896. Il se tua à la Meije le 20 août 1896, lors de la première ascension sans guide de ce sommet. Il est enterré au cimetière de Saint-Christophe-en-Oisans, à côté de l'alpiniste autrichien Emile Zsigmondy.

Enfin, pour compléter le portrait de cette personnalité qui n'a pas eu le temps de donner toute sa mesure, rappelons qu'il ne partageait pas la misogynie qui était encore de mise dans le milieu de l'alpinisme à cette époque. Sa femme le suivait dans beaucoup de ses courses. Il fit avec elle la première ascension sans guide du Mont-Aiguille. Ils firent aussi ensemble une ascension à La Meije en 1890, dont il donna le récit dans l'
Annuaire du Club Alpin en 1890. Vous pouvez télécharger ce récit à cette adresse :
Ascension au Pic occidental de la Meije ou Grande-Meije. 3,987 m.



Pour illustrer ce message, je n'ai pas trouvé de photo d'Ernest Thorant. Je l'illustre donc avec sa signature
et la tombe de Zsigmondy et Thorant au cimetière de Saint-Christophe-en-Oisans, illustration d'Ernest Hareux, dans La Meije et les Ecrins, de Daniel Baud-Bovy.


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