Après avoir évoqué son dernier ouvrage, les Fatourguetos, puis sa traduction de l'Iliade d'Homère, ce dernier message sur l’œuvre de l'abbé Pascal se conclut sur le premier ouvrage qu'il a publié, qui a marqué son entrée dans le monde du Félibrige haut-alpin et, surtout, dans le Félibrige mistralien.
Une nia dou païs
Gap, Typographie J.-C. Richaud, 1879, in-8°, 68 pp.
L'ouvrage anonyme a paru le 5 juillet 1879. En français, c'est « Une nichée du pays. ». Ce recueil contient 36 pièces en vers en patois gapençais, ainsi qu'un pièce liminaire et une pièce de fin, le tout précédé d'un court texte en français sur le patois de Gap. Il s'agit du premier ouvrage imprimé en langue des Hautes-Alpes. Certains des poèmes avaient paru dans l' Annonciateur dès 1877 et un texte Notre patois avait paru dans le même journal le 9 novembre 1878, annonçant la parution de cet ouvrage.
Dans son article, Les origines de la Société d’Études des Hautes-Alpes, (BSEHA, 1951), Paul Pons rappelle que ce livre a été un des éléments déclencheurs de la création de la Société d’Études des Hautes-Alpes. Cet ouvrage obtint un accueil très favorable et l'abbé Pascal reçut les félicitations de Mistral, qui lui conseillait d'entrer en relation avec les Félibres de Forcalquier.
L'abbé Pascal envoie son travail à Frédéric Mistral le 8 juillet 1879 :
Puisque votre Mirèio ne dédaigna pas Vincèn lou panieraire qu'avié li gauto proun moureto, puisqu'elle se mit à rire de si bon cœur en trouvant lou nis au bout de l'amourié peut être aurait-elle jeté un regard sur ma petite brochure une nia dou païs.
Je vous l'offre donc, ô Mistral (bien qu'elle se couvre les yeux de honte) parce que c'est notre premier essai de poésie patoise et j'ai cru qu'il était de mon devoir de vous en faire part.
J'espère, illustre & bien aimé Félibre que vous serez assez bon pour l'accepter en attendant que nous puissions vous offrir quelque chose de meilleur.
Votre tout dévoué serviteur & admirateur L'abbé F. Pascal vicaire à Gap
Monsieur l'abbé
J'ai été charmé par la lecture de la Nia dou pais, c'est vigoureux et gai comme le sang gaulois, comme le Bacubert de vos Alpes; vous connaissez bien votre langue, vous en savez le génie et les tournures propres, vous avez l'allégresse et l'entrain du vrai poète. Je suis heureux de vous le dire franchement : vous serez le félibre de votre pays, dépouillez votre style de ces mots gras, qui ne sont pas particuliers à votre dialecte et qui déparent un morceau littéraire, élaguez les gallicismes, et quand le mot vous manque, pêchez dans le provençal plutôt que dans le français : adaptez à votre idiome le système orthographique usité aujourd'hui dans tout le midi et vos œuvres seront lues, goûtées, applaudies, non seulement en Gapençais mais dans toute la Provence.
[...]
Il faudra aussi vous mettre en rapport avec les écoles félibresques les plus voisines de vos montagnes, car l'isolement décourage ainsi il y a l'école de Forcalquier, qui a pour président le chanoine Savy et pour devise plus aut que lis Aup.
L'accueil est chaleureux, mais non dénué de paternels conseils. Ce sera toujours la tonalité de leurs échanges.
A partir de là, germa l'idée de la création d'une société félibréenne à Gap, puis d'une société littéraire et scientifique. Lors de quelques réunions tenues au premier semestre 1881, les participants, sous l'égide de l'abbé Pascal, mirent au point les statuts de l'Escolo de la Mountagnou, puis de la Société d’Études des Hautes-Alpes. Rapidement, la première disparut, pour ne laisser la place qu'à la Société d’Études, qui accueillit en son sein les félibres locaux.
La suite logique de ce message est de présenter Lou librou de la mountagno qui marque véritablement la création du mouvement félibrige dans les Hautes-Alpes, lancé par la publication de l'abbé Pascal, Une nia dou païs.
Lou librou de la mountagno. I, Gap, J.-C. Richaud, Emprimur-Librari, Mai 1882, in-8°, 39-[2] pp.
Cet ouvrage est entièrement écrit en provençal. Il contient le Reglament de l'Escolo de la Mountagno, establio a Gap, promulgué lors d'un réunion à Gap le 28 mars 1881, suivi de la liste des membres. Il contient aussi une Crounico, de F. d'Allesandrès, rappelant l'histoire et les débuts de l'Escolo, en particulier l'importance de l'ouvrage anonyme de l'abbé Pascal, Une nia dou païs. Le reste de l'ouvrage contient des pièces en vers signés J. B. Gaut, Ed. Hugues, A. de Gagnaud (pseudonyme de L. de Berluc-Pérussis), Eugèni Plauchud, F. Pascal, F. d'Alessandres.
La part de l'abbé Pascal a été prépondérante dans la publication de cet ouvrage. De ce fait, de nombreuses bibliographies l'attribuent à l'abbé Pascal.
Dans : Jeux floraux de Provence. Fêtes latines internationales de Forcalquier et de Gap. Mai 1882, il est précisé que cet ouvrage a été publié le 15 mai 1882 et distribué « par une des ces attentions délicates auxquelles M. Richaud nous a depuis accoutumées » lors du banquet de la journée du 16 mai 1882, à Gap.
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