Parmi les ouvrages classiques sur les animaux de montagne, ceux du docteur Marcel Couturier gardent une place à part. En 4 travaux magistraux : Le Chamois (1938), L’Ours brun (1954), Le Bouquetin des Alpes (1962) et Les Coqs de bruyère (1980), il a fourni des monographies scientifiques précises et exhaustives sur ces animaux, en abordant tous les aspects : histoire naturelle, éthologie et, plus inhabituelle, chasse. Ces livres sont très abondamment illustrés, sur la base des propres clichés et dessins de l'auteur, et contiennent une très riche bibliographie. J'imagine que depuis, de nombreux travaux scientifiques ont complété la connaissance de ces animaux.
Ces ouvrages sont aussi des beaux livres à collectionner. Il y a
quelques mois j'ai acquis un exemplaire du tirage de tête (à l'époque,
les ouvrages scientifiques faisaient aussi l'objet de tirage de tête!) de
sa monographie sur Le Chamois. C'est une bonne occasion de présenter ces travaux et l'auteur (voir la notice plus complète sur le site : cliquez-ici).
C'est une belle impression de l'imprimerie Allier de Grenoble, pour le compte des éditons Arthaud de Grenoble. Le tirage de tête est composé de 15 exemplaires sur Japon impérial et 80 exemplaires sur Hollande Van Gelder (j'ai le n° 72).
Pour donner quelques chiffres afin d'illustrer l'ampleur du travail,
l'ouvrage compte plus de 850 pages, en un seul volume pour la tirage
courant et en 2 volumes pour le tirage de tête. Pour les illustrations,
le titre annonce : "110 clichés au trait, 15 radiographies, 473
héliogravures, 34 cartes en deux couleurs". Elles sont reparties entre
103 planches pleine page, dont seule la première, en frontispice, est
hors texte, et 76 figures dans le texte. La bibliographie à la fin de
l'ouvrage répertorie plus de 1000 références.
Cette planche, choisie parmi toutes celles qui illustrent l'ouvrage, montre le travail de précision scientifique de Marcel Couturier, basé sur des observations nombreuses et une recension photographique des particularités des animaux.
Cette planche, choisie parmi toutes celles qui illustrent l'ouvrage, montre le travail de précision scientifique de Marcel Couturier, basé sur des observations nombreuses et une recension photographique des particularités des animaux.
Cette autre planche est aussi l'occasion de parler plus longuement de l'auteur. Elle illustre l'autre aspect de la personnalité de Marcel Couturier, celle du chasseur impénitent qui, époque oblige, est fier de poser au milieu de ses trophées de chasse, trophées qui seront aussi minutieusement étudiés pour enrichir son travail scientifique, comme le montre la planche précédente.
En effet, le Docteur Marcel Couturier (1897-1973) était non seulement un grand chirurgien, un alpiniste de haut niveau (il a réalisé en 1932 avec A. Charlet la première ascension de la face nord de l’Aiguille Verte par le couloir appelé depuis couloir Couturier), un naturaliste de renom et un des promoteurs des parcs nationaux en France, en particulier celui de la Vanoise. C'était aussi un grand chasseur, qui n'hésita pas à exposer ces exploits dans ce livre paru en 1949 : Sur les traces de mes 500 chamois de France (changement d'époque oblige, la réédition de 1986 s'appelle plus simplement Mes Chamois de France et de Navarre). Il contient une page qui recense précisément son tableau de chasse :
Il a même été condamné deux fois pour braconnage, ce qui, pour une notabilité comme lui, montre qu'il avait vraiment dû dépasser les limites.
Ces deux aspects de sa personnalité sont clairement et honnêtement abordés dans les 2 notices de référence que l'on trouve sur Internet : site de l'Association pour Histoire de la Protection de la Nature et de l'Environnement (AHPNE) : cliquez-ici (la plus complète) et site du Muséum d'Histoire Naturelle de Grenoble : cliquez-ici. Pour prendre aussi du recul sur cette apparente contradiction, je rappelle ce que j'ai pu écrire sur Henry Faige-Blanc (1811-1901) qui a publié, sous le pseudonyme d'Alpinus, ses récits de chasse : La Chasse Alpestre en Dauphiné, paru en 1874 et réédité en 1925 avec des illustrations d'Emile Guigues. Dans ses récits, agrémentés de nombreuses digressions sur la cuisine, les mœurs, la politique, la philosophie, etc., au ton plein de verve, de légèreté, avec un soupçon de gauloiserie, l'auteur se veut aussi un défenseur des animaux. Dans son chapitre sur l'ours, il défend la réputation de l'ours, contre ceux qui le considèrent comme dangereux ou agressif. Par différents récits de chasse, il approche et décrit les mœurs de cet animal, qu'il souhaite voir toujours habiter nos montagnes. Son vibrant plaidoyer pour l'animal, joint à une vigoureuse défense de la chasse, n'est pas sans contradiction. Il ne semble pas se rendre compte qu'il concourt à la disparition de cet animal qu'il veut défendre. L'importance de la population d'ours vivant alors dans les massifs dauphinois lui masquait probablement le déclin inexorable. On retrouve ce même manque de lucidité pour les autres animaux.
Cette photo fait écho à celle du Dr Couturier devant les chamois de son tableau de chasse (reconnaissons qu'Alpinus a la fierté plus démonstrative!)
Ces deux aspects de sa personnalité sont clairement et honnêtement abordés dans les 2 notices de référence que l'on trouve sur Internet : site de l'Association pour Histoire de la Protection de la Nature et de l'Environnement (AHPNE) : cliquez-ici (la plus complète) et site du Muséum d'Histoire Naturelle de Grenoble : cliquez-ici. Pour prendre aussi du recul sur cette apparente contradiction, je rappelle ce que j'ai pu écrire sur Henry Faige-Blanc (1811-1901) qui a publié, sous le pseudonyme d'Alpinus, ses récits de chasse : La Chasse Alpestre en Dauphiné, paru en 1874 et réédité en 1925 avec des illustrations d'Emile Guigues. Dans ses récits, agrémentés de nombreuses digressions sur la cuisine, les mœurs, la politique, la philosophie, etc., au ton plein de verve, de légèreté, avec un soupçon de gauloiserie, l'auteur se veut aussi un défenseur des animaux. Dans son chapitre sur l'ours, il défend la réputation de l'ours, contre ceux qui le considèrent comme dangereux ou agressif. Par différents récits de chasse, il approche et décrit les mœurs de cet animal, qu'il souhaite voir toujours habiter nos montagnes. Son vibrant plaidoyer pour l'animal, joint à une vigoureuse défense de la chasse, n'est pas sans contradiction. Il ne semble pas se rendre compte qu'il concourt à la disparition de cet animal qu'il veut défendre. L'importance de la population d'ours vivant alors dans les massifs dauphinois lui masquait probablement le déclin inexorable. On retrouve ce même manque de lucidité pour les autres animaux.
Cette photo fait écho à celle du Dr Couturier devant les chamois de son tableau de chasse (reconnaissons qu'Alpinus a la fierté plus démonstrative!)
Par son âge et son origine, le docteur Marcel Couturier est l'héritier de cette époque, mais aussi un passeur vers une autre époque, celle que nous connaissons aujourd'hui, de la protection de l'environnement.
Pour finir, cette photo de chamois prise presque au bord de la route, en montant à l'Izoard, au printemps 2012 :