dimanche 15 juillet 2012

Des Ephemera préservés : le tourisme en Dauphiné.

Le premier Syndicat d'Initiative de France a été créé à Grenoble 1889 pour fédérer et développer les initiatives en faveur du développement du tourisme à Grenoble et dans le Dauphiné. Très vite, il s'est illustré par une grande activité éditoriale en publiant des livrets, des albums, des guides, etc. Il ne possédait cependant pas de périodique à destination de ses membres. C'est ainsi qu'en décembre 1908 paraît le premier numéro d'un bulletin mensuel simplement appelé L'Initiative, distribué gratuitement aux membres du Syndicat.


Il parait sous forme d'un journal de 8 grandes pages, se terminant toujours par une liste : Maisons spécialement recommandées par le Syndicat d'Initiative de Grenoble et du Dauphiné et une page d'annonces commerciales. Comme bulletin de liaison entre ses membres, les premiers numéros donnent la liste complètes des adhérents. On y trouve une majorité de Grenoblois, soit des représentants de la bourgeoisie local intéressés au développement touristique de la ville et de la région, soit des professionnels directement concernés comme les hôteliers ou certains commerçants. En dehors de Grenoble, ce sont surtout des hôteliers de la partie alpine de la région (Oisans, Hautes-Alpes, etc.).


Au-delà de ces pages pratiques, ce bulletin contient surtout des articles directement liés au développement touristique. Cela va d'un histoire du Syndicat et des ses activités par son président Armand Chabrand, jusqu'à des articles très pratiques sur les questions des dessertes par les trains, du développement du réseau télégraphique et téléphonique (comment appeler sa famille le dimanche soir ?) ou l'état et la construction des routes. Il contient aussi les différents comptes-rendus des assembles générales. Pour ouvrir des perspectives à ses membres, il n'hésite pas à aborder la question de l'hôtellerie à New-York ou la création des Parc Nationaux, à l'exemple de ce qui a été fait aux Etats-Unis. D'ailleurs, quelques articles sont consacrés aux premiers développements du futur Parc des Ecrins, par la mise en place d'une zone protégée dans la haute vallée du Vénéon (La Bérarde). Pour finir, il y a même une protestation sur un changement des dates des vacances universitaires, comme pouvant nuire à l'activité touristique (déjà !).


J'ai eu la chance d'acquérir une collection continue et reliée des bulletins de décembre 1908 (1ère année, n°1) à juillet 1914 (6ème année, n° 7), formant 6 années et 58 numéros (en règle générale, il y a 10 numéros par an). La question est : est-ce que la collection est complète ? Évidemment, il n'existe aucune bibliographie pour ce type d'ouvrages très éphémères (et un peu "communs", il faut le dire). Mes recherches dans les différents catalogues de bibliothèques publiques m'ont permis de ne trouver qu'une collection incomplète et disparate à la BNF : 6 numéros, dont le dernier est celui de décembre 1913. Ma collection va au-delà. Est-ce pour cela que l'on peut dire qu'elle est complète ? Je pense que oui car le dernier numéro est celui de juillet 1914. Le suivant aurait dû paraître en septembre (numéro d'août-septembre 1914). Il est probable qu'il n'a jamais paru à cause de la guerre. Remarquons pour finir qu'il n'existe aucun exemplaire dans le Fonds Dauphinois de la Bibliothèque Municipale de Grenoble.

Le Syndicat d'Initiative a publié de très nombreuses brochures à destination des touristes. A titre d'exemple, j'ai une petit plaquette de 24 pages, publiée en 1900 (100.000 exemplaires !) et distribuée gratuitement :
Le Dauphiné. Notice illustrée publiée par le Syndicat d'Initiative de Grenoble et du Dauphiné


La couverture porte une belle reproduction d'un tableau de Pierre Comba.


Cette image donnera un aperçu de la présentation soignée (voir la qualité de la photographie) du contenu :



Pendant que l'on est dans le tourisme, une carte publicitaire pour l'hôtel de la Meije à La Grave (Haute-Alpes), tenu par les frères Juge. Là-aussi, on peut constater la qualité de ce document, éphémère par nature (au passage, on peut noter la qualité de la conservation).




Autant je n'ai rien trouvé sur les bulletins Initiative, autant j'ai trouvé une référence pour ce document. Il est coté sous le n° 277 de l'inventaire de Paul Guillemin La Meije dans l'image. Cela m'a aidé à déchiffrer les deux signatures : E. Tézier, pour le dessinateur et Rougeron-Vignerot, pour le graveur.

dimanche 8 juillet 2012

La Meije vue du Chazelet, de Charles Bertier, 1909

Ce petit tableau de Charles Bertier vient de rejoindre ma collection :



C'est une huile sur carton (H : 256 mm, L : 163 mm.), signée en bas à gauche (voir notice détaillée).
 
Ce tableau est intéressant à double titre.

D'abord parce que c'est une représentation de la Meije, par un des maîtres du paysage dauphinois, qui a beaucoup peint les sommets et vallées du Haut-Dauphiné. Charles Bertier (Grenoble 1860 - Grenoble 1924) est un peintre grenoblois, qui a été l'élève de Jean Achard et de l'abbé Guétal.

Ensuite, l'autre intérêt de ce tableau est qu'il a été peint spécialement pour illustrer la couverture d'un recueil de poèmes de son ami Emile Roux-Parassac (1874 - 1940) : Les Poèmes de l'Alpe, Paris; Aurillac, 1910 (voir notice détaillée). Charles Bertier, en le peignant, avait déjà prévu le titre et le nom de l'auteur. La couverture du recueil est la reproduction à l'identique :


Au dos du tableau, se trouve un envoi signé de Charles Bertier à Emile Roux-Parassac :



Quelques éléments sur Charles Bertier :

Pour sa vie, on peut se reporter à cette notice Wikipédia bien complète : Charles Bertier.


 Portrait-charge de Charles Bertier, par E. Tézier,
avec un quatrain d'Emile Roux-Parassac

Deux exemples de ses œuvres :



Ces dernières années, deux tableaux de Charles Bertier représentant la Meije sont passés en vente :



Enfin, deux ouvrages de référence sur ce peintre :


La notice ci-dessous, publiée à l'occasion d'une exposition organisée en 1986 par l'Association pour la Création d'un Musée des Artistes Dauphinois (ACMAD),  contient une biographie complète par son petit-fils et une notice nécrologique chaleureuse par son ami Emile Roux-Parassac :



Enfin, dernier témoignage du lien entre Charles Bertier et Emile Roux-Parassac, cette reproduction d'un tableau de Charles Bertier, incluse dans le recueil de poésies : Souffles d'en haut, d'Emile Roux-Parassac, totalement illustré par des artistes dauphinois.

En Oisans : approche de l'orage, de Charles Bertier

Ce tableau de Charles Bertier, peint vers 1900, obtint un grand succès. Il a été présenté dans plusieurs expositions. Lors de l'incendie de son atelier de la Bajatière, cette oeuvre a  été détruite alors qu'elle venait d'être emballée pour être expédiée à un collectionneur de Seattle (U.S.A.). Cette reproduction dans l'ouvrage d'Emile Roux-Parassac est un des seuls témoignages sur ce tableau aujourd'hui à jamais disparu.

Comme je l'avais déjà fait pour un autre tableau (voir ici, en fin de message), j'ai confié sa restauration (un coin était cassé, avec perte de la couche picturale) et son nettoyage à Adeline Velten : Atelier d'Adeline.

mardi 3 juillet 2012

Les Dauphinoiseries de Monsieur Gariel

En ce XIXe siècle avide de découvrir et de mettre en valeur les trésors bibliographiques de nos provinces, un homme, Hyacinthe Gariel, inamovible bibliothécaire de la ville de Grenoble de 1848 à 1882, a voulu apporter sa contribution au dévoilement de trésors bibliographiques et historiques du Dauphiné restés manuscrits.



Il entreprit en janvier 1852 de publier des textes inédits sous le titre inventé par lui de Delphinalia, que l'on pourrait traduire par "du Dauphiné", mais aussi, par Dauphinoiserie. Il s'en explique dans l'introduction :
« Sous le titre Delphinalia, nous commençons la publication d'une série de documents inédits et souvent inconnus, mais tous relatifs à l'ancienne province de Dauphiné. ». Les documents « viendront tour à tour et sans préséance aucune » et seront accompagnées de « quelques notes rapides ». Il termine : « Nous n'avons qu'un but : celui d'arracher à une perte plus ou moins certaine, à un oubli plus ou moins immérité, et de livrer aux amis et aux curieux de nos annales encore à rédiger, un foule de documents perdus dans des collections particulières ou enfouis dans des dépôts publics, où malheureusement si peu de personnes viennent les consulter. »


Cette première série est composée de 5 brochures, formant chacune un tout en soi. Il s'agit de la publication de textes inédits, restés manuscrits et possédés par la bibliothèque municipale de Grenoble. Ils concernent essentiellement l'histoire du Dauphiné aux XVIe et XVIIe siècle. On y trouve de nombreux textes de l'historien du Dauphiné Guy Allard, dont les manuscrits sont entrés à la bibliothèque grâce à Hyacinthe Gariel. Ces textes sont publiés avec de courtes introductions et quelques notes de bas de page. Malgré cela, ils sont livrés au public sans appareil critique, ni mise en perspective vis-à-vis de l'histoire du Dauphiné. Ce sont des matériaux "bruts" à destination des historiens et des amateurs.


Les tirages sont tous différents, mais ils restent faibles, entre 90 et 120 exemplaires, ce qui rend d'autant plus rare la collection complète. Ces brochures ont pour date de publication : janvier 1852, mai 1852, avril 1854, octobre 1855 et septembre 1856. On voit qu'avec le temps, le rythme ralentit fortement. Après cette dernière brochure, Hyacinthe Gariel s'attelle à la publication des manuscrits qui forment la Bibliothèque historique et littéraire du Dauphiné, collection à laquelle appartient le Dictionnaire historique,chronologique, géographique,généalogique, héraldique, juridique,politique et botanographique du Dauphiné, de Guy Allard.

En 1868, Hyacinthe Gariel est l'âme et l'animateur d'une société de quinze bibliophiles dauphinois qui fait paraître la Revue des Bibliophiles dauphinois. Dès le premier numéro, il renoue avec sa volonté de faire paraître de nouveaux textes inédits sur le Dauphiné. Comme il l'annonce lui-même : « Sous ce titre [Delphinalia], que nous avons inventé il y a quelques vingt ans, – trop longtemps hélas ! – nous publierons de petites anecdotes, de petites pièces vers ou prose, historiques, biographiques, philologiques, bibliographiques, anecdotiques, en un mot toutes les dauphinoiseries possibles. Ce sera petit, ce sera menu. Mais il n'y a rien de petit pour qui cherche et qui veut comprendre. »


Le revue disparaît en 1874. Hyacinthe rassemble en un volume tous les documents Delphinalia qu'il a publiés dans la Petite Revue des Bibliophiles dauphinois, dont il a été le maître d'œuvre pendant les 5 années de sa publication de 1869 à 1874. La présentation est la même, jusqu'aux petits dessins humoristiques de Diodore Rahoult représentant des Dauphins dans des scénettes burlesques ou grotesques. Cette page donne une bonne illustration du style des textes et des dessins de Diodore Rahoult :


Malgré l'histoire chaotique de la publication de ces Delphinalia qui s'étale sur plus de 20 ans de 1852 à 1874, il existe quelques exemplaires complets, reliés par des amateurs. C'est un de cela qui vient de rejoindre ma bibliothèque, sous une simple reliure de percaline. Vu la faiblesse des tirages, c'est déjà un "exploit" de voir un tel recueil.


Pour une description complète de cet ouvrage : cliquez-ici.
Voir une notice biographique de Hyacinthe Gariel (1812-1890)