dimanche 18 juillet 2010

Guide du Haut-Dauphiné, 1887 : l'ancêtre des topo-guides

En 1887, trois pionniers de la découverte et de l'exploration des Alpes dauphinoises, W. A. B Coolidge, Félix Perrin et Henry Duhamel conjuguent leurs efforts pour publier le premier guide d'excursions et d'ascensions du Haut-Dauphiné (massifs des Ecrins, des Rousses, des Aiguilles d'Arves et autres massifs voisins) : Guide du Haut-Dauphiné.


Ce guide se présente sous une relieur d'éditeur, en toile cirée, avec rabat et pochettes intérieures, qui en faisait un ouvrage facile et pratique à emporter avec soi en excursion. C'est dire la difficulté de trouver des exemplaires en bon état, alors que par nature, ils étaient destinés à affronter l'environnement hostile d'un sac à dos et les manipulations en pleine montagne.


Ce guide est organisé par itinéraires. C'est l'ancêtre des topo-guide actuels. Il contient en particulier une carte, établie par Henry Duhamel, qui précise la topographie et la toponymie des massifs. C'était encore un sujet de discussions et de débats, la connaissance des massifs n'étant pas encore complète.


L'extrait suivant est une illustration de la méthode des auteurs dans la description des itinéraires :

Un des intérêts de cet ouvrage est le nombre et la qualité des références bibliographiques pour tous les itinéraires décrits. Cela doit permettre, le cas échéant, de rassembler les éléments d'une histoire de l'exploration et de la découverte des massifs des Alpes dauphinoises.

Un Supplément est publié en 1890 :


L'exemplaire présenté est l'exemplaire personnel d'un des trois auteurs, Félix Perrin avec son ex-libris.



Avec un tel guide dans la poche, il ne nous reste plus qu'à partir en vacances à l'exploration de ces massifs, suivant les traces de nos glorieux devanciers.

lundi 12 juillet 2010

Peaks, Passes and Glaciers. 1862 : un incunable de l'âge d'or de l'alpinisme.

L'Alpine Club, le premier club alpin au monde, a été fondé en Angleterre en décembre 1857. En 1859, sous la présidence de John Ball, il édite un recueil d'articles : Peaks, passes, and glaciers : A series of excursions by members of the Alpine club, Longman, Green, Longman, and Roberts, 1859 (voir ici).


Devant le succès rencontré, l'Alpine Clubs, alors présidé par Edward Shirley Kennedy, édite un deuxième recueil en 1862, en 2 volumes : Peaks, Passes, and Glaciers; being Excursions by Members of the Alpine Club. Second series.



(Pour plus d'informations, cliquez-ici)

Cet ouvrage se présente comme un recueil de 32 articles, répartis en 15 chapitres. Quelques exemples de chapitres pour donner un aperçu des centres d'intérêt de ces gentlemen alpinistes anglais (23) qui partaient à la découverte de la montagne.
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A tour in Iceland in the summer 1861.
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The Ober-Engadin.
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The Chamounix District.
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The High-Level Glacier Route from Chamounix to Zermatt.
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The Peaks, Passes and Glaciers of the Monte Rosa Chain.
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The Pyrénées.
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The Glaciers of Norway.
etc. etc.

Ce sont deux chapitres qui ont particulièrement retenu mon attention. Le premier,
The Cottian Alps, est le récit par William Mathews de l'exploration puis de la première ascension le 30 août 1861, du Mont-Viso, en Italie, à la lisière du Dauphiné.
Monte Viso from the N., from Taylor and Nodier and original sketches


Mais c'est surtout le chapitre Excursions in Dauphiné qui est un extraordinaire recueil de 4 articles, précédés d'une introduction, qui décrivent les premières explorations des Alpes dauphinoises, ce qu'on appelle aujourd'hui le massif des Ecrins ou l'Oisans. Pourquoi extraordinaire ? Parce que l'on croit lire des récits d'explorations par d'intrépides aventuriers au fin fond de la jungle, à la rencontre de paysages et d'hommes inconnus. Et pourtant, on n'est qu'à quelques dizaines de kilomètres de Grenoble. Preuve s'il en est que la montagne était encore un territoire à découvrir. Il faut lire les savantes dissertations sur la topographie du massif pour se rendre compte combien une simple description des principaux sommets était encore un travail difficile. Autre intérêt, la rencontre de ces Anglais bien élevés, déjà habitués au confort victorien, qui se confrontent aux auberges dauphinoises, dont la saleté devient légendaire. Ne parlons pas des échanges parfois difficiles avec les habitants du cru. Certains se font même qualifiés d'escrocs (les Rodier à La Bérarde), parce qu'en bons Dauphinois, ils se montrent assez près de leurs sous, voire légèrement intéressés. Malgré cela, les 4 auteurs se montrent émerveillés par la beauté et la sauvagerie des paysages. Même s'ils n'échappent pas au lieu commun de les comparer à la Suisse, on sent une vraie fascination pour ce pays âpre, secret et sauvage.

Ces 4 articles sont :
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The passage of the Col de la Tempe, from the valley of La Bérarde to the Val Louise; and of the Col de l'Echauda, from Val Louise to Le Monétier, par R. C. Nichols, F.S.A.
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The Val de St. Christophe and the Col de Sais, par le Rev. T. G. Bonney, M.A., F.G.S.
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A sketch of the passage of the Col de la Selle from La Grave to St. Christophe, par F. Elliot Blackstone, B.C.L, F.R.G.S.
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The ascent of Mont Pelvoux, par Edward Whymper.
Ce sont des récits d'excursions et d'ascensions tous situés entre 1855 et 1860.

Autre intérêt de ces 4 textes, ils sont accompagnés d'une riche iconographie : 14 gravures sur bois dont certaines sont parmi les premières représentations des sommets et des paysages de la région. N'oublions pas que nous sommes déjà en 1862 et que l'on a déjà dessiné et représenté des paysages des antipodes, du fin fond de l'Afrique.


Col de Sais, and glacier of Condamine. (Glacier de la Pilatte)

Pinnacles of Mont Pelvoux, from the Glacier Noir.


Glaciers of the valley of Aléfroide. (Le Glacier Noir et le Glacier Blanc)


La Bérarde

The mountains of St. ChristopheI (La Tête des Fétoules)


L'Aléfroide (Pic sans Nom)


Aiguille du Midi de la Grave. (La Meije)


Mont Pelvoux from above La Bessée

Mont Pelvoux from the vallon d'Alfred. (Ailefroide)


L'ouvrage a paru dans un cartonnage d'éditeur, mais cet exemplaire a ensuite été relié.



Il provient de la bibliothèque d'un professeur de Cambridge, le Reverend Alfred Valentine Valentine-Richards (1866-1933), membre de l'Alpine Club. Son bel ex-libris est un hommage à la montagne :


La devise :
Levavi Oculos Meos in Montes est extraite du Psaume 121 : "J'ai levé mes yeux vers les montagnes", qui se poursuit par : "d'où me viendra le secours ?". Belle devise pour un amoureux de la montagne !

samedi 3 juillet 2010

Une belle plaquette publicitaire : La Route des Alpes. 1912.

Une collection thématique peut s'enrichir de tous types d'ouvrage. Aujourd'hui je vous présente une belle plaquette publicitaire de 1912, éditée par les Automobiles Berliet, de Lyon, pour vanter les mérites de ses châssis. Quel est donc le lien avec les Alpes et le Dauphiné ? Tout simplement que, pendant la saison de mai à octobre 1911, des automobiles Berliet ont assuré un service régulier sur la route des Alpes, qui va de Nice à Thonon. Le but était de démontrer la fiabilité et la robustesse des châssis.


En 1912, les automobiles Berliet publient cette plaquette pour être distribuée à ses clients par l'entremise de ses agents (la page de garde porte le cachet gras d'un agent Berliet de Clermont-Ferrand). Ils font appel aux talents d'un célèbre imprimeur publicitaire de l'époque, les frères Draeger, de Paris. Le texte d'introduction, tout à la gloire de la montagne, texte de commande, est signé d'une plume prestigieuse de l'époque, J. H. Rosny Aîné. Il est illustré de nombreuses photographies en noir et blanc. Cette reproduction de la première page met bien en valeur la qualité de la typographie et de la composition. Le bandeau, qui court sur toutes les pages, est une composition typographique reprenant "Automobiles Berlet" dans un style très Art nouveau.


Ce qui fait le prix de cette plaquette est aussi les 3 planches en couleurs, reproductions de dessins (pastels) ? de Jeanès représentant : une route de montagne, le Mont Blanc et le massif de la Meije depuis le Galibier, selon un point de vue assez inhabituel (reproduit ci-dessous).


La marque des frères Draeger en quatrième de couverture.

Sur cette célèbre firme, voir la notice Wikipédia : Draeger.

D'autres images de la Meije : Les images anciennes de la Meije