En 1930, le lyonnais Achille Escudié, au soir de sa vie, se fait un petit plaisir personnel en immortalisant une page mémorable de sa vie, son ascension des arêtes de la Meije en 1895. Rassemblant un graveur, des illustrateurs, des artisans du livre, il met tout son soin à faire un bel objet, bien illustré, ne choisissant que des papiers de qualité et offrant à ses proches ce souvenir de leur parent et ami.
Cela donne cet ouvrage tiré à seulement 90 exemplaires : Les Arêtes de la Meije, "édité aux dépens de l'auteur et pour ses amis" en 1930. L'exemplaire décrit est sur Japon impérial.
Le texte avait été publié dans l'Annuaire du Club Alpin Français, 1896. Mais l'ouvrage vaut surtout pour les belles représentations de la Meije, d'après des dessins de Jeanès et de l'affichiste Libis (Herbert Libiszewski), gravés par Georges Beltrand. En voici un florilège :
On peut regretter l'époque où les amateurs éclairés, pour laisser un souvenir d'eux, mettaient un peu de leur fortune à faire un beau livre. Quel souvenirs laisserons-nous ? des blogs ?
Poursuivant sur les ouvrages consacrés à la Meije, j'ai décrit plus précisément deux petites plaquettes.
La première est le récit d'une série de tentatives d'ascension de la Meije par Henry Duhamel en août 1875, alors que le sommet était encore invaincu.
Tentatives d'ascension au Pic Occidental de la Meije ou Aiguille du Midi de la Grave (Hautes-Alpes), Paris, 1876.
Avec ses compagnons de cordée, ils cherchaient la voie pour atteindre le sommet. Cet été-là, ils tentèrent de la gravir par la face nord. Ils durent renoncer. Cette petite plaquette est illustrée de quelques belles photographies et d'un dessin d'Emile Guigues.
Autre plaquette, le récit d'une ascension de la Meije par Ernest Thorant en 1890 :
Ascension au Pic occidental de la Meije ou Grande-Meije ou Grande-Meije. 3,987 m., Paris, 1890.
Ernest Thorant, un alpiniste prometteur, fondateur du Rocher-Club de Grenoble, s'est tué à la Meije le 20 août 1896. Il est enterré au cimetière de Saint-Christophe-en-Oisans.
Ayant fait cette ascension avec sa femme, il termine son texte par : "Les femmes qui veulent peuvent en montagne, autant que les hommes". Cela peut paraître naïf, mais ce n'était pas aussi évident à cette époque qui, à quelques exceptions près, n'avait guère vu de femmes s'illustrer en montagne.
Pour finir, deux photos spectaculaires : un loup au Plan-de-Phazy, près de Guillestre. Ces photos, prises par un agent de l'ONF cet hiver, démontrent, s'il en était besoin, que le loup est bien présent dans les Hautes-Alpes. Cela me donne envie de décrire quelques ouvrages que nos anciens lui ont consacré, plein de la terreur qu'il suscitait.