Avant de clore cette année qui s'est avérée bibliophiliquement riche, il fallait bien que mes quelques jours lyonnais soient encore l'occasion de derniers achats. J'ai ainsi pu acquérir deux ouvrages anciens, dans leur modeste reliure de parchemin d'époque. Ce sont deux traités de droit de Denis de Salvaing de Boissieu (1600-1683), un jurisconsulte dauphinois, premier président de la Chambre des Comptes de
Grenoble, de fraîche noblesse, qui s'est montré, comme cela arrive souvent, un des experts les plus pointus en droits seigneuriaux.
En 1652, chez le libraire Nicolas de Grenoble, paraît le Traité du plait seigneurial. C'est un exemplaire de cette édition originale que je vous présente :
Il est dans son parchemin d'origine :
Le premier acheteur a porté cette mention manuscrite sur la page de garde. On apprend ainsi que ce Gaillard (ou Gaillaud) a acheté ce livre à Grenoble le 3 juillet 1652. Voilà un sieur qui se tenait au courant des nouveautés de l'année !
Denis de Salvaing de Boissieu a ensuite élargi son propos, tout préoccupé qu'il était du statut juridique de ses récentes seigneuries. Il publie alors en 1664 : De l'usage des fiefs et autres droits seigneuriaux en Dauphiné.
Toujours dans son parchemin d'origine :
Un des deux ouvrages provient de la bibliothèque de Charles Jaillet, un érudit dauphinois, mort plus que centenaire en 2006. J'ai ainsi pu compléter ma page consacrée aux ex-libris dauphinois (cliquez-ici). Cet ex-libris gravé par H. Léty représente quelques monuments célèbres de Vienne, dont la fameuse Aiguille qui était au centre du cirque romain. Par ailleurs, je vous laisse faire le lien entre la devise et la date.
Jean Faure, du Serre
Un article récent dans Provence généalogie m'a remis en mémoire un petit ouvrage que je possède, qui rassemble les Œuvres choisies de ce notaire et sous-préfet, poète à ses heures.
Cet exemplaire de la petite édition chez Delaplace à Gap en 1858 est surtout notable par la belle reliure en maroquin au dos richement orné, reliure signée de Magnin (s'agit-il de Marius Magnin, relieur lyonnais ? Je ne sais, car je crois lire S. Magnin)
J'aurais l'occasion de vous parler de Jean Faure, du Serre, dont je possède quelques ouvrages, dont les rares premières éditions de son poème La Tallardiade.
Digressions
J'ai eu envie de faire deux digressions qui nous éloignent du Dauphiné, mais qui démontrent l'extraordinaire puissance d'Internet pour ceux qui aiment chercher et fouiner comme moi. Comme certains le savent peut-être, je suis aussi généalogiste à mes heures perdues et j'ai profité de cette trêve de fin d'année pour compléter l'histoire de ma famille.
Une simple recherche dans Gallica, sur un nom de famille, m'a fait retrouver ce courrier, sur un beau papier à en-tête :
Il s'agit d'un courrier de mon arrière-grand-père à la compagnie des eaux de Roubaix (est-ce que mes courriers administratifs seront visibles dans 100 ans sur Internet ?).
Un autre courrier de son prédécesseur à la pharmacie de Roubaix qu'il a tenue pendant la première moitié du XXe siècle est un bel exemple du style fleuri de l'époque.
Ce monsieur sollicite le raccordement au réseau d'eaux : "vous me feriez un sensible plaisir en donnant des ordres à votre service pour qu'on me fournisse l'eau le plus vite qu'il sera possible". Je crois que la prochaine fois que j'écrirais (ou j'enverrais un mail) à une des ces nombreuses administrations sans âme de notre époque, je leur exprimerais le "sensible plaisir" que j'aurais à obtenir ce que je n'arrive pas à obtenir malgré mes messages, mes appels aux répondeurs vocaux et autres outils modernes de "relation client". C'est peut-être le sésame ?
Au passage, je dois avouer que je ne suis pas un pur dauphinois ni montagnard. Tant pis, je dois bien dire qu'il y a un peu de sang mêlé dans mes veines. L'arrière-grand-père pharmacien était bourguignon et auparavant installé à Dijon (Eh oui! je suis un peu Bourguignon).
L'autre digression familiale est un extraordinaire texte, encore trouvé sur Gallica, à propos des pouvoirs de magnétiseur d'un médecin jurassien, le docteur Thouverey, qu'un de ses disciples a raconté dans cet ouvrage paru en 1880 :
Une révolution en philosophie résultant de l'observation des phénomènes du magnétisme animal. Etude physiologique et psychologique de l'homme, par le Dr Tony Dunand (du Jura)
Je vous laisse découvrir cette incroyable histoire, avec apparitions (personnellement, je ne vois jamais de "personnage colossal" à l'heure de me coucher, mais il est vrai que je ne bois que de la tisane !), pouvoirs surnaturels et femmes intransigeantes : cliquez-ici.
Pour faire le lien, et pour ceux qui ont lu jusqu'au bout, la femme qui par son intransigeance a fait perdre tous ses pouvoirs au dit docteur est une de mes lointaines tantes, née à Paris en 1803 (le Dauphiné est de plus en plus loin), fille d'un Grognard et d'une jeune fille de la Mayenne (j'aggrave mon cas !)
Revenons à nos montagnes avec cette belle vue de la Meije depuis la tête de la Maye :
3 commentaires:
Les deux premiers ouvrages du XVIIe s. sont très beaux et semble-t-il assez rare non ?
Pour être précis il faudrait dire "parchemin" et non "vélin" car ce sont bien des parchemins de l'époque. Le parchemin se distingue par la trace évidente de l'implantation des soies de porc encore visible dans la peau traitée à la chaux. Ce qui n'est pas le cas du vélin qui est une peau de veau mort né dont l'implantation du poil n'est pas visible.
Bonnes fêtes !
Bertrand Bibliomane moderne
Merci Bertrand pour cette précision. J'ai corrigé. Je ne suis pas très familier des reliures XVIIe, mais j'aurais pu le savoir car j'ai un ouvrage relié en vélin et la comparaison est éclairante.
Les deux ouvrages sont rares, en particulier "Lusage des fiefs". Mais ce qui est encore plus rare, c'est le petit recueil de poésies de 1858.
Bonnes fêtes à toi.
Jean-Marc
Ce petit Traité du Plait me plait beaucoup à moi aussi !
Bonnes Fêtes Jean Marc
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